QUELQUES REGLES CONCERNANT
LA CELEBRATION DE L’EUCHARISTIE
Abréviations utilisées dans ce texte :
SC = Sacrosanctum Concilium = Constitution sur la sainte liturgie du concile
Vatican II ;
RS = Instruction Redemptionis Sacramentum sur ce qui doit être observé et évité concernant la très sainte Eucharistie par la congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements et approuvé par le pape Jean-Paul II le 19 mars 2004 en la fête de saint Joseph.
La liturgie ne se fabrique pas : elle se reçoit et personne, pas même un évêque ou un prêtre, ne peut la modifier (1). Dans le document sur les normes liturgiques de 2004, nous pouvons lire : « ici ou là, il arrive que les prêtres, les diacres ou les laïcs introduisent, de leur propre initiative, des changements ou des variations dans les textes de la sainte liturgie, qu’ils sont chargés de prononcer. Cet usage doit être réprouvé. Dans le même document, il rappelle aussi que toutes les normes relatives à la liturgie, établies par une conférence des évêques, selon les normes du droit, pour son propre territoire, doivent être soumises à la recognitio (reconnaissance et approbation) de la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements, sans laquelle elles n’ont aucun caractère d’obligation » (2) (3).
Au lieu de s’affranchir des règles liturgiques ou de vouloir les modifier selon ce que nous voulons ou saisissons, pourquoi n'essayons-nous pas de les comprendre et de les appliquer pour en vivre ? En effet : « Dieu ne nous accorde pas dans le Christ cette liberté illusoire qui consiste à faire ce que nous voulons, mais la liberté qui nous permet de faire ce qui est digne et juste (4) ».
Quand le rite reconnu par l’Eglise est fermement établi, il est important de s’y tenir : il donne les repères dont notre esprit a besoin pour accéder au calme si nécessaire à la contemplation et à l¹approfondissement du mystère célébré. C’est aussi tout cela que veut nous rappeler la constitution dont nous souhaitons l’application et dont les normes sont rappelées dans l’instruction Redemptionis Sacramentum. Nous ne sommes donc ni rigides ni rétrogrades quand nous souhaitons voir appliquer ces nouvelles normes liturgiques. Nous sommes simplement persuadés que le jour où seront compris la liturgie et le mystère qu’elle célèbre, alors nous ne la critiquerons plus mais nous la vivrons telle que l'Eglise demande qu’elle soit vécue.
« Privé de sa valeur sacrificielle, le Mystère eucharistique est considéré comme s’il n’allait pas au-delà du sens et de la valeur d’une rencontre conviviale et fraternelle » (5). Il est donc urgent de faire en sorte que la catéchèse conduise « à corriger les notions et les pratiques superficielles qui se sont diffusées (...) dans certains lieux, au cours des dernières années, et qu’elle prenne soin de raviver sans cesse chez les fidèles un sens rénové de profonde admiration envers le caractère sublime de ce mystère de foi, qu’est l’Eucharistie. De fait, en célébrant l’Eucharistie, l’Eglise passe sans cesse de ce qui est ancien vers ce qui est nouveau En effet, dans la célébration de l’Eucharistie, de même que dans toute la vie chrétienne, qui y puise sa force et qui tend vers elle, l’Eglise, comme l’Apôtre saint Thomas, se prosterne, adorant le Seigneur crucifié, mort, enseveli et ressuscité dans la plénitude de sa splendeur divine, et elle s’exclame en permanence : mon Seigneur et mon Dieu ! » (6).
La nouvelle édition du Missel de l’an 2000 et ses nouvelles normes liturgiques n’obligent pas à la rigidité, mais laissent la possibilité aux laïcs de nombreux choix pour la célébration Eucharistique.
Ainsi, nous voyons que « pour promouvoir et manifester la participation active des fidèles, le renouveau récent des livres liturgiques a favorisé, selon les intentions du Concile, les acclamations du peuple, les réponses, la psalmodie, les antiennes, les chants, de même que les actions ou les gestes, et les attitudes corporelles, et il a pris soin de faire observer en temps voulu le silence sacré, en prévoyant aussi, dans les rubriques, les parties qui reviennent aux fidèles (7) .
De plus, un large espace est laissé à une liberté d’adaptation opportune, qui est fondée sur le principe que chaque célébration doit être adaptée aux besoins des participants, ainsi qu¹à leur capacité, leur préparation intérieure et leur génie propre, selon les facultés établies par les normes liturgiques. Dans chaque célébration, il existe d’amples possibilités d’introduire une certaine variété dans le choix des chants, des mélodies, des oraisons et des lectures bibliques, ainsi que dans le cadre de l’homélie, dans la préparation de la prière des fidèles, dans les monitions qui sont parfois prononcées, et dans l’ornementation de l’Eglise en fonction des temps liturgiques. Ces éléments doivent contribuer à mettre en évidence plus clairement les richesses de la tradition liturgique, et, tout en tenant compte des nécessités pastorales, à conférer avec soin une connotation particulière à la célébration, dans le but de favoriser la participation intérieure. Cependant, il faut se souvenir que l’efficacité des actions liturgiques ne réside pas dans les changements fréquents des rites, mais en vérité dans l’approfondissement de la parole de Dieu et du mystère célébré » (8).
Mais il est aussi rappelé que « pour que la liturgie de l’Eglise se déroule d’une manière digne et convenable, tous, ministres ordonnés ou fidèles laïcs, en accomplissant leur ministère doivent faire tout ce qui leur revient et cela seulement (cf. SC numéro 28) autant dans la célébration liturgique elle-même que dans sa préparation (9) ». Afin de retrouver le goût pour une liturgie authentique, il faut aussi s’initier à un silence auquel nos liturgies actuelles ne nous habituent guère. Actuellement, au cours des célébrations, nous cherchons plus à faire des choses qu¹à être qui nous sommes. Or, le Saint-Esprit agit dans nos coeurs davantage lors des silences qu’à travers l’activisme. Les règles de la célébration liturgique données par la plus récente édition du Missel romain rappellent que « le silence sacré fait partie de la célébration et doit être aussi observé en son temps. Sa nature dépend de la place qu’il occupe dans chaque célébration: dans la préparation pénitentielle et après l’invitation à prier, chacun se recueille ; après une lecture ou une homélie, on médite brièvement ce qu¹on a entendu ; après la communion, le silence permet la louange et la prière intérieure. Avant la célébration, elle-même, il est bon de garder le silence dans l’Eglise, à la sacristie et dans les lieux avoisinants : il permet à tous de se disposer à célébrer les saints mystères avec coeur et conformément aux rites (10)». Pour ce qui concerne le chant, il est rappelé que « durant la célébration de la liturgie, les paroles des chants préservent et alimentent, comme il convient, la foi des fidèles (11) ».
Au sujet de l’autel, l’Eglise rappelle qu’il n’est jamais permis de célébrer la messe sur une table à manger. Comment doit se présenter l’autel ? Dans le choeur des églises, il ne devrait y avoir qu’un seul autel, tout comme il n’y a qu’un seul sacrifice. Si l’autel est fixe (c’est-à-dire qu’il adhère au pavement du sanctuaire) il devra être dédicacé. S’il s’agit d’un autel mobile (c’est-à-dire dont l’emplacement est provisoire), il sera seulement béni. Pour toute célébration de l’Eucharistie, l’autel devra être orné avec modération et bon goût. On ne déposera sur l’autel que ce qui est utile et nécessaire pour la célébration de la messe. Les fleurs seront déposées à coté de l’autel ou devant. Il y aura 4 ou 6 chandeliers pour toutes les messes dominicales et 2 pour les autres messes. Il y aura aussi une croix avec l’image du crucifié pour rappeler au prêtre qu¹il ne célèbre pas « face au peuple » mais face à Celui qui a donné sa vie pour tous les hommes.
Quant aux vases sacrées (calices, ciboires, patènes), ils doivent être réalisés dans une matière solide, inaltérable et noble. Pour l’Eucharistie elle-même, on utilisera du pain azyme, du vin pur et de l’eau.
Parmi les rites que le prêtre doit obligatoirement effectuer figure le lavement des mains. Ce geste introduit autrefois pour des raisons pratiques, demeure aujourd’hui dans la liturgie comme un geste symbolisant la nécessité, pour le célébrant, de se purifier intérieurement au moment d’accomplir le sacrifice du Christ.
Quels vêtements doivent porter les acteurs de la liturgie ? Celui qui sert le prêtre à l’autel et que l’on nomme servant de messe ou acolyte, doit revêtir une aube ou bien la soutane et le surplis, comme cela se fait toujours encore ailleurs qu’en France. Le diacre, en plus de l’aube, met une étole en diagonale et une dalmatique (cette dernière pouvant être omise pour les messes non solennelles). Le célébrant met une aube, une étole et une chasuble. Pour tous, l’aube doit être serrée à la taille par un cordon pour éviter qu’elle ne flotte immodérément (12). Pour l’étole et la chasuble, nous devons tenir compte de la couleur liturgique prévue : vert pour les messes du temps ordinaire, blanc pour les fêtes de la sainte Vierge, des Anges et des Saints non martyrs, rouge le Vendredi saint, à la Pentecôte ainsi qu’aux fêtes de la Croix et des Martyrs, violet durant les temps de pénitence (Avent et Carême) ainsi que pour les messes des défunts (où le violet peut être remplacé par le noir). Aux grandes fêtes, il est permis d'employer des vêtements liturgiques dorés et, au cours de deux dimanches dans l¹année (dimanche Laetare et dimanche Gaudete) on peut employer des vêtements de couleur rose.
Quelles langues peuvent être utilisées pour célébrer la liturgie ? Sur ce point, les textes officiels sont tous très clairs : la messe peut être célébrée en latin (13) en tout temps et en tout lieu, ou dans une autre langue, à condition d’utiliser les textes liturgiques approuvés par le Magistère. Il faut rappeler que l’efficacité sacramentelle d’une célébration ne dépend pas de la langue employée, et il faut redire à certains inconditionnels du « tout en français » que le fait de comprendre la signification des mots au cours d’une célébration ne conduit pas forcément à saisir le sens profond de la célébration elle-même.
Pour les Lectures faites au cours de la messe, il y en a deux en semaine : une tirée de l’Ancien Testament ou du Nouveau Testament et l’autre des Evangiles. Le dimanche il y en a trois : une provenant de l’Ancien Testament, la seconde se trouve dans le Nouveau Testament et la troisième est l’Evangile. Ces lectures sont entrecoupées par des chants: Graduel ou psaume responsorial, et Alléluia ou Trait (on ne dit pas l’alléluia mais une courte phrase chantée ou lue pendant le Carême). Il est strictement interdit, au cours de la messe de proposer des lectures (poèmes ou textes profanes) autres que celles qui sont tirées des Ecritures.
En ce qui concerne l’homélie, il est précisé qu’elle « est prononcée au cours de la célébration de la sainte Messe - car elle fait partie de la liturgie elle-même - par le prêtre célébrant lui-même ou par un prêtre concélébrant, ou parfois par le diacre. Jamais par un laïc (14) »
« La proclamation de la Prière eucharistique, qui, par nature, est le sommet de toute la célébration, est réservée au prêtre en vertu de son ordination. Ainsi, c’est un abus de faire dire certaines parties de la Prière eucharistique par un diacre, par un ministre laïc, ou bien par un fidèle ou par tous les fidèles ensemble. C’est pourquoi la Prière eucharistique doit être dite entièrement par le prêtre, et par lui seul. Pendant que le prêtre célébrant prononce la Prière eucharistique, il n'y aura pas d’autres prières, ni d’autres chants ; de même, l’orgue et les autres instruments de musique resteront silencieux. Cependant, le peuple participe toujours activement à cette prière sacerdotale: il s’associe au prêtre dans la foi et en silence, ainsi que par certaines interventions établies dans le cours de la Prière eucharistique et qui sont les réponses au dialogue de la Préface, le Sanctus, l’acclamation après la consécration et l’acclamation Amen après la doxologie finale (15) ».
La Sainte Communion est donnée sur la main ou directement dans la bouche. Si quelqu’un communie sur la main, il faut vérifier qu’il consomme bien l’hostie et ne la garde pas pour la profaner. La communion se fait soit à genoux, soit debout. Si nous communions debout, nous devons faire un geste de respect avant de recevoir l’hostie. En aucun cas les fidèles peuvent prendre eux-mêmes l’hostie dans un ciboire ou une corbeille qu’ils se passeraient de l’un à l’autre : c’est toujours un ministre qui donne la communion (16). Et pour terminer sur la question de la communion, « Il n’est pas permis à celui qui reçoit la communion de tremper lui-même l’hostie dans le calice, ni de recevoir dans la main l’hostie, qui a été trempée dans le Sang du Christ. De même, il faut que l’hostie, destinée à la communion par intinction, soit confectionnée en employant une matière valide, et qu’elle soit consacré; il est donc absolument interdit d’utiliser du pain non consacré ou fabriqué avec une autre matière (17) ».
Reste à étudier le problème des filles enfants de choeur. Le Saint-Siège a clairement précisé que des jeunes filles peuvent être autorisées à servir la messe, mais que la préférence doit être donnée aux garçons. Pour que des jeunes filles puissent servir la messe dans les paroisses d'un diocèse, il faut que l¹évêque du lieu ait clairement donné une autorisation motivée accompagnée d¹explications claires. A notre connaissance, aucun évêque n’a, en France, donné une telle autorisation qui, au demeurant, ne serait valable que pour son diocèse et n’aurait aucun caractère d’obligation (18).
En guise de conclusion, il faut rappeler que « quand un abus est commis dans la célébration de la sainte Liturgie, il faut reconnaître qu’il s’agit d’une véritable falsification de la liturgie catholique. Saint Thomas a écrit que celui qui offrirait à Dieu, de la part de l’Eglise, un culte en opposition avec les formes qu’elle a instituées par autorité divine, et que pratique cette même Église, se rendrait coupable du vice de falsification. Afin de porter remède à de tels abus, la tâche la plus urgente est celle de la formation biblique et liturgique du peuple de Dieu, pasteurs et fidèles », afin que la foi et la discipline de l’Eglise concernant la sainte Liturgie, soient correctement présentées et comprises. Toutefois, là où les abus persistent, il faut procéder selon les normes du droit, pour sauvegarder le patrimoine spirituel et les droits de l’Eglise, en ayant recours à tous les moyens légitimes » (19).
« La Congrégation pour le Culte divin a rappelé que l’Evêque diocésain est tenu de promouvoir la discipline liturgique commune à toute l’Eglise et en conséquence il est tenu de rendre urgent l’observation de toutes les lois ecclésiastiques » (20) - que lui-même doit en principe connaître et suivre pour servir d’exemple -.
« Chaque fois que la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements a connaissance d¹un délit ou d’un abus commis à l¹encontre de la très sainte Eucharistie, elle en informe l’Evêque, afin que celui-ci fasse une enquête sur le fait. Si l’acte en question s’avère grave, l’Evêque doit envoyer, le plutôt possible, à ce même Dicastère romain, un exemplaire des actes relatifs à l’enquête qui a été faite, et, éventuellement, à la peine qui a été infligée. (...) Dans les cas les plus difficiles, l’ordinaire ne doit pas négliger, pour le bien de l’Eglise universelle, dont il partage lui aussi la sollicitude en vertu de la sacrée Ordination, de traiter la question, après avoir consulté la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements. De son côté, cette même Congrégation, en vertu des facultés qui lui ont été concédées par le Pontife Romain, doit aider l’Ordinaire, selon le cas, en lui concédant les dispenses nécessaires, ou en lui communiquant les instructions et des prescriptions, qu’il doit appliquer consciencieusement » (21).
La Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements souhaite que, grâce aussi à l’application attentive des normes rappelées dans la présente Instruction Redemptionis Sacramentum, l’action du très saint Sacrement de l’Eucharistie rencontre moins d’obstacles dûs à la fragilité humaine, et que, si l’on parvient à écarter tout abus et à bannir tout usage illicite, par l’intercession de la Bienheureuse Vierge Marie, la femme eucharistique, la présence salvifique du Christ resplendisse sur tous les hommes dans le Sacrement de son Corps et de son Sang (22) .
Notes :
(1) SC 22 ; RS numéros 31 et 32 ;
(2) RS numéro 59 ;
(3) RS numéro 28 ;
(4) RS numéro 7 ;
(5) RS numéro 38 ;
(6) RS numéro 40 ;
(7) SC numéros 30 et 31 ;
(8) RS numéro 39 ;
(9) RS numéro 44 ;
(10) SC numéro 30 ;
(11) RS numéro 58 ;
(12) RS numéros 123 et 124 ;
(13) RS numéro 112 ;
(14) RS numéro 64 ;
(15) RS numéros 52 à 54 ;
(16) RS numéros 92 à 94 ;
(17) RS numéro 104 ;
(18) RS numéro 47 ;
(19) RS numéros 169 et 170 ;
(20) RS numéro 177 ;
(21) RS numéros 181 et 182 ;
(22) RS numéro 185.